1.8.05

Rediffusion

L'été, c'est la période des rediffusions... Avant de partir en vacances quelques semaines, j'ai réuni ci-dessous plusieurs de mes anciens posts pour faire une espèce de FAQ sur le thème de "Chère (oh oui qu'elle est chère), chère Sécu, comment te quitter ?".

D'abord quelques confusions que je rencontre tout le temps chez ceux qui sont perdus dans le maquis volontairement obscur du système français (rassurez-vous, il y a un an j'étais au même stade que vous).

1) Le système de santé français en lui-même ne doit pas être confondu avec la sécurité sociale.

Cela paraît une évidence, mais combien de fois m'a-t-on envoyé des e-mails du genre : "vous critiquez la Sécu parce que vous êtes en bonne santé, mais attendez, si vous étiez malade, vous changeriez d'avis !". Ainsi le chroniqueur social-démocrate Jean-Marc Sylvestre (bien connu sur la radio étatique nationale), quand il raconte ses trois mois passés à l'hôpital aux frontières de la mort, en arrive à faire une vibrante apologie de la Sécurité sociale ! (il ne s'est pas rendu compte qu'il existait des assureurs privés moins chers qui remboursaient mieux).

A côté de l'hôpital public, il y a les hôpitaux privés, les cliniques et, bien que ses praticiens (conventionnés) deviennent quasiment des salariés de la sécu, il y a la médecine libérale. Le système de santé français n'est pas le meilleur du monde (il est à la merci d'une petite canicule de temps en temps), mais s'il était aussi mal en point que la sinistre Sécu, il y aurait de quoi s'inquiéter ! Heureusement qu'on n'a pas encore réussi à transformer tous les médecins en fonctionnaires, ni le serment d'Hippocrate en serment d'hypocrite !

2) Les organismes de sécurité sociale ne sont pas limités aux "caisses" du même nom.

Des mutuelles (par exemple MGEN, mutuelle des profs, RAM pour les non-salariés, MSA pour les agriculteurs, etc.) rendent depuis longtemps des prestations de "sécurité sociale", terme à comprendre dans le sens franco-français qui n'existe pas ailleurs, l'onction "sécurité sociale" accordée par l'Etat signifiant qu'elles bénéficiaient, au nom de la soi-disant mission de service public, du double verrou (en monopole dans leur domaine, avec des "adhérents" prisonniers : ainsi les profs sont tous à la MGEN). Outre les mutuelles et les CPAM (qui sont des mutuelles), des sociétés d'assurance ou des institutions de prévoyance peuvent rendre aussi des prestations de "sécurité sociale", au sens large, que nous allons voir ci-dessous.

3) La sécurité sociale ne désigne pas une entreprise unique (publique ou privée), ni même une institution, mais un domaine réglementé.

Ainsi dire "je vais écrire à la Sécurité sociale" n'a aucun sens. La caisse de sécu qui s'occupe de vous (ou de moi), salariés encore prisonniers, n'est pas une succursale d'un quelconque Mammouth étatique, c'est un organisme (parmi bien d'autres) de droit privé à but non lucratif, une véritable entreprise (dixit M. Pierre Ramon-Baldier, directeur de l'Ecole nationale de la Sécurité sociale).

Il faut en fait distinguer deux notions différentes quand on parle de sécurité sociale :
- le régime légal de sécurité sociale : les dispositions législatives et réglementaires qui définissent les risques sociaux ainsi que le niveau de leur couverture ;
- les organismes autorisés à couvrir ces risques sociaux (maladie, vieillesse, accidents du travail, chômage) compris dans le régime légal de sécurité sociale : ce sont exclusivement, suite à la transposition des directives européennes, des sociétés d'assurance, des institutions de prévoyance, ou des mutuelles.

Donc ne confondons pas le domaine et les opérateurs. Le démenti officiel de notre gouvernement socialiste de droite quant au prétendu monopole repose entièrement sur cette confusion volontaire : la sécurité sociale est obligatoire, disent-ils, donc vous devez adhérer au "monopole". Ce à quoi nous répondons : l'assurance a beau être obligatoire, nous avons la liberté de choix, le monopole n'existant plus.

4) Le terme de mutuelle est trop souvent cantonné au sens franco-français de "mutuelles complémentaires" (c'est à dire censées être exclues du "monopole").

Bien que les CPAM soient des mutuelles comme les autres, le gouvernement a longtemps essayé de faire croire que les directives européennes ne concernaient que les mutuelles (sous-entendu : complémentaires), alors que tous les organismes participant à la gestion d’un régime dit "légal" sont concernés. On trouve cette volonté d'induire en erreur dès la promulgation par le gouvernement socialiste de gauche de l'ordonnance no 2001-350 du 19 avril 2001 transposant les directives, voir le rapport au Président de la République. Mais le mensonge finit toujours par être découvert, au détriment du menteur.

A présent, quelques idées fausses qu'on entend ou lit continuellement, et d'autres questions, bien légitimes.

  • La SS fait partie des acquis sociaux chèrement gagnés
    Faux, le monopole de la SS a été imposé en 1945 par le Parti Communiste. Aujourd'hui c'est un (soi-disant) acquis social inefficace et très chèrement payé !

  • Vous voulez donc un système ultralibéral comme aux USA ou au Royaume Uni ?
    Faux, ces systèmes ne sont pas libéraux, renseignez-vous. Au Royaume Uni le système est extrêmement étatisé (par exemple on ne peut pas changer de médecin comme on veut). Pour les USA, voir ce qu'en dit David Valancogne.

  • On ne peut pas quitter impunément la sécu, on se met dans une situation très grave.
    Y a-t-il une vie en dehors de la sécu ? Il y a 20 ans les habitants des pays de l'Est se posaient la même question à propos de l'Union Soviétique. Quand un système ne marche pas, il finit tôt ou tard par s’effondrer. Aucun intérêt de rester sur un paquebot qui coule.

  • Mais je croyais que le gouvernement avait fait une réforme ?
    Il s'agit d'un replâtrage technocratique qui n'empêchera pas le paquebot de continuer à couler. Ils ne sont d'ailleurs pas d'accord entre eux sur la date exacte où se produira le naufrage complet.

  • La santé n'est pas une marchandise, on ne peut pas la laisser au marché
    Continuez dans cette logique et vous nous expliquerez aussi que "la nourriture n'est pas une marchandise" (n'est-elle pas indispensable pour la santé ?). On n'aura alors plus qu'à décréter la nationalisation des boulangeries et de tous les commerces d'alimentation.

  • Je suis salarié(e), comment faire pour quitter la Sécu ?
    Commencez par écrire une lettre à votre DRH, voici un modèle possible.

  • C'est bien beau toutes vos considérations juridiques, mais je ne trouve pas la loi française qui dit explicitement que le monopole de la Sécu est abrogé !
    Evidemment ! Il n'y a pas de loi qui dise qu'il existe un monopole de la Sécu ! Donc il n'y a pas à abroger quelque chose qui n'existe pas. Tout ce que la loi dit c'est que l'assurance est obligatoire, et ça, on ne le conteste pas. De même pour l'assurance automobile, elle est obligatoire mais on ne vous force pas à aller chez telle ou telle compagnie.

  • Pourquoi parlez-vous tout le temps des lois européennes ? En France seule existe la loi française.
    Bien sûr ! J'invoque uniquement la loi française qui transpose les lois européennes, l'Ordonnance no 2001-350 du 19 avril 2001 relative au code de la mutualité et transposant les directives 92/49/CEE et 92/96/CEE du Conseil des 18 juin et 10 novembre 1992.

  • Je l'ai lue, mais cette loi ne parle que des mutuelles.
    Attention, "mutuelle" est à comprendre dans un sens très large (son sens d'origine), et non dans le sens restreint franco-français de "mutuelle complémentaire". Le code de la mutualité concerne également les Caisses de Sécu, héritières des "sociétés de secours mutuel" du XIXe siècle, dont Bastiat redoutait déjà la nationalisation.

  • Vous êtes contre la Sécurité sociale, alors ?
    Je suis pour la "sécurité sociale" au sens large, englobant aussi bien les organismes actuels (de droit privé) que les compagnies privées qui commencent à arriver et offrent le même genre de service. Toutes font de la "sécurité sociale".

  • Les cotisations à la sécurité sociale sont obligatoires, on ne peut pas y échapper.
    Je ne conteste pas le caractère obligatoire d'une assurance santé, en effet il faut éviter d'être à la charge des autres. Je cherche seulement à faire jouer la concurrence en optant pour une sécurité sociale privée, en contractant avec une compagnie privée plutôt qu'avec le "régime général".

  • Vos assurances privées ne prendront pas en charge les maladies graves, les patients âgés, l'hospitalisation, etc. Elles n'assureront que les personnes sans risques majeurs...
    Faux, elles remboursent frais médicaux, hospitalisation, etc., à 100% des frais réels. Pour l'hospitalisation, il y a un plafond (par exemple 1500000€ par an chez IHI). Et tout cela avec une couverture mondiale, à vie, et pour moins cher que la Sécu. Voyez un peu ce que vous payez actuellement chaque mois : 55% de votre salaire part en fumée. C'est comme si vous étiez payé un jour sur trois.

  • Et si votre compagnie privée fait faillite ?
    Eh bien j'en prendrai une autre ! Et vous qui restez à la SS, que ferez-vous si la SS ne peut plus rembourser ?

  • La SS dépend de l'Etat, elle est donc plus solide qu'une société privée.
    La sécurité sociale ne dépend pas de l'Etat (si ce n'est qu'elle lui refile ses dettes comme elle peut). Elle est en faillite, vous ne lisez pas les journaux ?

  • Si tout le monde quitte la SS, comment feront les plus pauvres ?
    Il faut distinguer le problème de l'assurance (mutualisation des risques) et celui de la solidarité à l'égard des plus pauvres. Ce sont deux choses différentes. Dans un cas, on paye pour un service, dans l'autre, on donne gratuitement. L'Etat et la Sécu ont tout intérêt à mélanger les deux, et à extorquer un maximum au nom de la solidarité.

  • Comment fait la Sécu pour survivre tout en étant toujours en déficit ?
    J'appelle ça le circuit du blanchiment de la dette sociale : ça tiendra... jusqu'à ce que ça craque ! On ne sait pas quand, mais ce qui est sûr c'est que chaque jour on s'en rapproche...

  • Y a-t-il vraiment des gens qui ont quitté la Sécu (légalement), ou s'agit-il seulement de velléités ?
    Il y a des gens qui ont quitté la Sécu, voyez quelques témoignages - notre forum aussi en compte plusieurs.
  • 11 commentaires:

    Constantin a dit...

    Bravo, excellent pot-pourri de vos interventions ! Gageons que ce nouveau brûlot doit faire grincer bien des dents de policiciens.

    Constantin a dit...

    Au fait, ma chère Laure, je viens de réaliser que "quitter la Sécu" est un astucieux contrepet. Est-ce intentionnel ?

    Laure Allibert a dit...

    Non, ce n'est pas intentionnel, je suis nulle en contrepets... En revanche je suis bonne en anagrammes (Laure Allibert est un anagramme).

    privat a dit...

    Désolé mais je ne vois pas le contrepet...

    Constantin a dit...

    Disons pour vous mettre sur la voie que cela implique une demi-douzaine de postérieurs.

    privat a dit...

    Désolé je vois encore moins

    Laure Allibert a dit...

    Je suppose que dans "quitter la Sécu" il faut intervertir le "é" et le "i", mais le résultat n'est pas satisfaisant...

    Constantin a dit...

    @Laure

    Mais si, cela devient "quêter là six culs", "quêter" étant une expression argotique dont je présume que la signification ne vous échappe pas.

    @gaywatch
    Puisque nous n'avons rien compris, éclairez de votre science les pauvres imbéciles que nous sommes , ô puits de savoir.

    Laure Allibert a dit...

    à Bernard : inutile cher ami, je soutiens l'action de C. Reichman.

    Cela ne veut pas dire que je partage toutes ses idées, je suis libertarienne/anarcap alors qu'il est un libéral conservateur. Nos idées convergent souvent au plan social et économique, elles peuvent différer sur les aspects politiques et éthiques.

    Laure Allibert a dit...

    Vos questions n'appellent pas de réponse : en effet, vous confondez systématiquement assurance et solidarité.

    Vous avez des excuses, c'est en fait ce que cherchent à faire depuis toujours l'Etat et la Sécu. Et les gens non informés tombent dans le panneau. On veut "plus de solidarité", donc augmentons les impôts, les cotisations, etc. Piquons non pas 55% mais 70% du salaire des gens !

    Je suis pour la solidarité, mais évidemment pas la solidarité forcée comme la conçoivent les esclavagistes étatiques. Mon idée de la solidarité est l'idée libérale, qui a toujours existé avant que l'Etat ne mette ses grosses pattes dans ce domaine.

    Lire par exemple :
    http://www.liberaux.org/wiki/index.php?title=Solidarit%C3%A9

    Laure Allibert a dit...

    Supprimé lien inutile vers http://www.securite-sociale.fr/ qui colporte le mensonge d'Etat. On en a assez longuement parlé dans ce blog.